Dans
un rapport transmis, mardi 21 février, à Xavier
Bertrand, ministre de la santé, l'inspection générale
des affaires sociale (IGAS) dresse un réquisitoire
sévère contre l'organisation de la formation
médicale continue (FMC). Selon le document, ce
secteur, censé améliorer les pratiques
médicales des professions de santé, brasse des
millions d'euros dans une opacité totale, multiplie
les conflits d'intérêts et n'a jamais, depuis
dix ans, appliqué les textes réglementaires.
Une
situation qui perdure, dans l'indifférence des
pouvoirs publics, mais à la satisfaction de
l'industrie pharmaceutique et des syndicats médicaux.
" Les diverses tentatives de refonte du système
de la FMC, initiées en 1996 (...), ont sans cesse
achoppé sur des problèmes de gouvernance et de
financement, sur fond de rivalités syndicales ",
constate l'IGAS. " Force est de constater la
faiblesse problématique du rendement du service public
dans ce domaine et le gaspillage des ressources investies
dans l'élaboration des textes législatifs ",
ajoute-t-elle.
Combien
de médecins la FMC concerne-t-elle, et pour quel coût
? Impossible à dire, puisqu'il n'existe pas de "
données globales et fiables ". L'inspection
estime que seul un médecin sur cinq participe à
des journées de formation, alors que celle-ci est
obligatoire depuis 1996. Seuls les financements
institutionnels (70 millions d'euros en 2005) sont connus.
Ceux de l'industrie pharmaceutique " restent opaques
". Évalués " entre 400 et 600
millions d'euros ", ils constituent pourtant "
le vecteur essentiel de financement de la FMC ".
"
Le niveau réel de financement de l'industrie est
d'autant plus malaisé à cerner que la frontière
entre dépenses de promotion et dépenses de
formation est difficile à tracer ", relève
l'IGAS. Celle-ci observe que la formation des médecins
libéraux est largement financée par les
laboratoires pharmaceutiques, et celle des hospitaliers par
l'industrie biomédicale. Tout cela concourt à
un système qui ne garantit pas l'indépendance
des formations et qui, " sauf à accepter que
la FMC ait pour fin essentielle la promotion des produits,
est en totale contradiction avec les objectifs affichés
de maîtrise médicalisée des dépenses
de santé ".
Le
rapport de l'IGAS souligne " l'omniprésence
des conflits d'intérêts ". Ainsi, les
organisations syndicales siègent-elles dans les
instances d'agrément des organismes de formation,
alors qu'elles ont elles-mêmes créé leurs
propres organismes. L'IGAS cite un exemple éloquent :
" En 2004, près de la moitié des fonds
publics de la FMC a été attribuée aux
organismes de formation situés dans la mouvance du
même syndicat représentatif pour une seule
catégorie de médecins ". " Il
serait préférable, poursuit-elle, d'exclure
les organisations syndicales de la gestion des appels
d'offres. "
Sandrine
Blanchard
Article
paru dans l'édition du 28.02.06
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