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Infirmières : évolution des frais d'inscription aux concours d'entrée aux IFSI[1] et des coûts des formations (1ière partie) © Isabelle AUBERT-BAUDRON Cette enquête (2006-2016), permet de comprendre, à travers l’observation de l’évolution des études d’infirmière depuis les années 80, comment les réformes réalisée par les gouvernements successifs ont mis en place une pénurie progressive du nombre des soignants, via une administration omnipotente et hypertrophiée, qui a assujetti fonction soignante et la santé publique à des intérêts privés, dénaturant ainsi les services publics en privilégiant les critères financiers aux critères scientifiques et humains, au mépris de la constitution de la nation qui les emploie. Dans le domaine des différences d'accès à la profession infirmière en France et en Belgique, je me demandais à quoi était due la sélection qui filtre les candidats à l'accès aux études de la profession en France, sélection est apparue avec la réforme des études d’infirmière. Elle est absente en Belgique, où il suffit aux candidats bacheliers de s'inscrire dans une école d’infirmières, comme c’était encore le cas en France avant cette réforme.
a) Avant le concours d’entrée : Une conversation récente avec une élève d’un IFSI m'a édifiée sur ces raisons : cette élève se plaignait des frais conséquents qu'elle avait à payer pour pouvoir entreprendre ses études. Elle m'en a fait le détail, que je relate ci-dessous (chiffres 2006 ; pour 2016, voir ci-dessous) : Frais d'inscription au concours d'entrée dans une école d'infirmière : 135 € - écrit: 85 € - oral: 50 € A noter qu'en cas de désistement, ces frais d'inscription demeurent acquis à l'institut et ne seront pas remboursés, quelle que soit la cause d'empêchement éventuel à concourir. b) Une fois le concours réussi : - Frais d'inscription à l'école : 150 € - Achat des blouses : 105 € - Frais de sécurité sociale : 180 € Soit un total de 435 €. Ainsi cette élève avait dû débourser en tout 570 € pour passer le concours d’entrée et être opérationnelle pour commencer ses études. Or, en ce qui concerne les frais d'inscription au concours d'entrée, dans la mesure où une proportion importante des candidats est éliminée à l’écrit, ils devront les payer de nouveau chaque fois qu'ils passeront un concours dans un autre IFSI. En raison de l'importante sélection, la plupart d'entre eux s'inscrivent dans plusieurs écoles à la fois, pour augmenter les chances d'être admis dans une seule. Si bien qu'ils doivent les verser de nouveau à chaque concours d'entrée. Dans certaines villes, le nombre de candidats est important : plus de 2000 inscrits au concours à Toulouse par an. Ce qui fait alors, pour 2000 candidats : 135 X 2000 = la coquette somme de 270 000 € encaissés par cette école. Le site Infirmiers.com http://www.infirmiers.com/faq.php#18 donne les chiffres suivants :
La somme de 1000 euros pour les tenues, comparée aux prix des vêtements professionnels, semble faramineuse : il faut compter une moyenne de 17,90 + 19,90 = 37,80 € pour un ensemble tunique - pantalon chez Vetpro www.vetementpro.com/?gclid=CLuq8-Hc67wCFYjLtAod7XsAgA . En admettant que l'élève se procure 4 tenues : 38 X 4 = 152 €. On est loin des 1000 €. Dans la plupart des IFSI, quatre tenues sont vendues aux alentours de 100 €.
Les études en IFSI publics sont gratuites, mais celles en IFSI privées sont payantes :
Ces éléments permettent de mieux comprendre les enjeux derrière l’instauration d’une sélection drastique de l'accès aux IFSI, qui se révèle en réalité une véritable manne sur le plan comptable. Le but de la sélection n'est pas tant la qualité des promotions d’élèves que l'élimination des candidats pour multiplier les inscriptions de ceux-ci dans diverses écoles et en même temps, les frais qu'ils doivent payer.
Pour ce qui est des aides-soignantes : Une fois le candidat reçu au concours et intégré à l'école, la formation est payante :
Ce coût est pour le moins dissuasif dans la mesure où peu d'élèves sortant du secondaire disposent de 5000 € pour acheter une formation au cours de laquelle elles effectuent un travail aide-soignant sur leurs lieux de stage, et qui débouche sur un travail demandant des qualités humaines et des compétences précises, un emploi précaire et mal payé. Dans les faits, un certain nombre de gens qui passent le concours d'aides-soignantes sont des agents de service effectuant déjà un travail aide-soignant en maison de retraite, ou pour des associations de service à la personne, etc., et dont les études sont payées par l'employeur, dans le cadre de la formation continue. En fait, dans ce cas, l'employeur a déjà largement gagné l'argent qu'il investit dans ces formations, en employant pendant des années des gens non qualifiés pour réaliser un travail qualifié. Mais cette formule a en plus pour lui ce dernier l'avantage d'avoir à sa botte un personnel manipulable, dont l’avenir professionnel dépend de lui et dont il n'aura pas à redouter l'opposition.
Depuis la réforme, après un an passé dans le service comme « faisant fonction », les futurs cadres doivent suivre un an de formation dans une école de cadres. Deux exemples en 2016: a) Institut Régional de Formation Sanitaire et Sociale Provence-Alpes-Côte d'Azur Corse :
b) Institut de Formation des Cadres de Santé (IFCS)
4. Les écoles de préparation aux concours d'entrée aux IFSI :La sélection mise en place et les nombreux échecs aux concours ont entraîné l'apparition d'écoles de préparation aux concours d'entrée, dont les tarifs sont variables : Voir à ce sujet le site de la Faculté des Lettres, Sciences du Langage et Arts : qui propose une préparation au concours d'entrée aux écoles d'infirmières :
Un site Structure d'Enseignement, de Conseils et de Formation auprès des Institutions, des Associations et des Etablissements de santé, SECOIAE propose des préparations aux concours d’entrée en école d’infirmière, d’aide-soignante et d’auxiliaire de puériculture:
Tarif de prépa en 2016 :
5. Changements sémantiques : Avec la réforme des études d’infirmières est apparue une nouvelle terminologie, de nombreux acronymes, des termes nouveaux pour représenter les nouveaux concepts de cette réforme, empruntés au management d’entreprise : Les écoles d’infirmières deviennent des IFSI. Le bureau du personnel devient le « bureau des ressources humaines », les salariés changeant du statut de citoyens à celui de simple ressource, dont la valeur se réduit à celle d’un simple objet de profit. Les surveillants deviennent des « cadres de santé » : ils cessent d’être des soignants, sortent des grilles de roulements infirmiers pour devenir exclusivement des administratifs. Etc. : voir les pages suivantes:
La nouvelle terminologie est ainsi incompréhensible aux gens formés antérieurement, la connaissance et la compréhension des nouveaux concepts nécessitant des formations. Un des problèmes que pose la prévalence des critères de management sur tout autre critère, c’est que ledit management n’est pas une science exacte, si bien qu’une foultitude de consultants « experts » en management se bousculent au portillon, chacun d’eux proposant une modélisation de son invention, faisant généralement référence à des pseudo-modèles de management dans l’air du temps : au départ, une méthode basée sur un faux postulat relatif à la nature humaine (« l’homme est menteur par nature »...), enfermant des groupes d’individus (chômeurs, malades mentaux, handicapés, etc.), dans une problématique de culpabilité à partir de laquelle est construite une théorie censée justifier les moyens de contrôle divers des groupes visés, afin de prémunir la société de la faute qui leur est attribuée. Ces modélisations, aux coûts exorbitants, se présentent sous la forme d’un verbiage mêlant pêle-mêle des termes empruntés, au choix, à des théories psychologiques diverses, à des techniques de manipulation, au développement personnel, au coaching, à des spiritualités de cuisine bricolées pour la circonstance, et à une hiérarchie basée sur des degrés d’initiation. Le tout baptisé d’un nom issu de l’imagination de son inventeur, généralement accompagné du nom de celui-ci, la Théorie Machin Chose de Tartarin Trucmuche. En raison du manque de cohérence de ces constructions intellectuelles, déconnectées des réalités dont elles prétendent traiter et dont le sens des termes qu’elles emploient varie selon leurs auteurs, il ne s’agit pas là de représentations symboliques scientifiquement valides et fiables, de modèles composés de mots chargés de sens, dont le contenu représenterait une réalité tangible, effective et observable, mais d’un ensemble de mots-bruits qui ne représentent rien, dissimulant sa vacuité derrière une phraséologie ivre de prétention, censée n’être accessible qu’à une petite élite d’initiés. L’escroquerie élevée au rang des beaux-arts! En raison de la compétition entre tous ces modèles, ceux-ci se succèdent à la vitesse de la lumière, d’où la propension des entreprises à en changer souvent. Tous ces changements sémantiques engendrent une actualisation permanente de toute la bureaucratie, et, à travers les dossiers informatisés, une multitude de programmes informatiques à des prix divers, qui changent constamment, et impliquent, pour les établissements, d’en changer régulièrement. Ces programmes changent également en fonction des sociétés : un programme de la société X ne convient pas à la société Y ; changer de partenaire entraîne pour chaque établissement un ensemble de dépenses de matériel inutile.
Si nous comparons avec les études d’infirmières telles qu'elles se déroulaient avant la réforme et l'instauration du tronc commun : Auparavant l'inscription à l’école était libre, sur présentation du baccalauréat, les frais se limitaient à l'achat des blouses, des livres, et du chemisier de l'uniforme (il y avait un uniforme obligatoire dans le cadre de l’école) : chemisier bleu, jupe bleu-marine, gilet bleu marine; les écoles fournissaient les chemisiers). Les seuls frais requis se résumaient alors (1970): - pour les pensionnaires aux frais de pension pour une chambre au foyer de l’école (110 Fr par mois), - pour les demi-pensionnaires, aux frais de demi-pension : 1 ou 2 repas par jour : 100 Fr ou 150 Fr / mois - aux frais d’uniformes : 2 coiffes, 3 blouses, 4 tabliers, 2 chemisiers bleus : 200 Fr - 50 Fr pour les frais de bibliothèque et les dépenses occasionnées pour les visites documentaires. Total sans les frais de pension et de repas : 250 Fr pour l’année, autrement dit, des études gratuites. - Idem pour les études d'aide-soignante. Les infirmiers de secteur psychiatrique étaient payés pendant leurs études, sans être tenus par un contrat : ils pouvaient, au soir de leur diplôme, décider d’aller cultiver des roses si cela leur chantait. Le concours d'entrée, pour les bacheliers, se limitait à un entretien oral avec les formateurs de l'école, et, pour les non bacheliers, à des épreuves écrites comprenant une épreuve d’anatomie, physiologie, et pathologie de l’organisme humain ainsi qu’une dissertation. Il n’y avait pas d’écoles de cadres, les surveillants étaient nommés en fonction de leur ancienneté et de leurs capacités personnelles. Ils étaient avant tout des soignants, travaillant au même titre que les infirmiers auprès des patients, mais avec un pouvoir de décision. Ils jouaient un rôle important dans l’accompagnement et l’enseignement des élèves sur le terrain, dans la mesure où ils transmettaient une connaissance des patients, de leur historique, des comportements adaptés à adopter en fonction des individus et des pathologies, et de l’évolution de la psychiatrie, l’ouverture des asiles à laquelle ils avaient participé après la deuxième guerre mondiale. En plus du surveillant-chef, l’actuel « cadre supérieur de santé », la partie administrative, les tâches informatiques, étaient réalisées par les secrétaires médicales. Si, en 2016, « Une partie du rôle du cadre de santé consiste à générer du profit pour permettre à son établissement de pouvoir réinvestir dans des matériels médicaux coûteux », le surveillant-chef d’alors, en plus de l’organisation administrative du service, participait aux prises en charges des patients, aux projets thérapeutiques, à l’organisation des activités, et pouvait prendre des décisions fondées sur sa connaissance d’un contexte et d’une équipe médicale dont il faisait intégralement partie. L’évaluation des agents avait lieu une fois par an et se résumait à une note et une appréciation. Il n'y avait pas alors de pénurie d'infirmière, pas de harcèlement, les écoles recrutaient en fonction des besoins des établissements hospitaliers, les agents avaient les moyens de travailler correctement, s’impliquaient beaucoup, le taux d’absentéisme était très bas et les gens ne changeaient pas de profession au bout de 5 à 10 ans. L’évolution qui s’est opérée à partir des années quatre-vingt a consisté à supprimer purement et simplement en psychiatrie le contenu de trois ans d’études, et, plus globalement dans la santé, à départir les soignants dans leur ensemble de leur pouvoir de réflexion et de décision concernant leur propre travail, de leur propre connaissance du métier, et leur propre fonction thérapeutique dans le cadre du service public, confisqués par une administration déconnectée du terrain et raisonnant sur des seuls critères de profits privés.
Ainsi, au-delà des changements sur la forme, la réforme de ces études, sur le fond, a consisté à structurer celles-ci sur les bases de l'économie de marché, à organiser la pénurie de soignants à travers une planification de l'exclusion, permettant de faire payer ce qui était gratuit à l’origine et devrait le rester dans un pays où l’enseignement républicain est censé être libre et gratuit: les professionnels de santé qui participent à la formation sont des fonctionnaires, les écoles (IFSI) n'ont pas à gagner de l'argent pour les rétribuer, puisqu'ils le sont déjà par l'Etat avec les deniers public. Les coûts des formations consistent alors à faire payer aux citoyens une deuxième fois ce qu'ils payent déjà avec leurs impôts. Ainsi, l’introduction de ces méthodes de gestion privée dans les services publics, loin d'être une source d'économie, a créé un trou noir dans lequel se sont engouffrés de multiples acteurs publics et privés, qui n’intervenaient pas auparavant dans les fonctions hospitalières, et ont engendré une multiplication de dépenses non nécessaires, dont les structures parasitiques mises en place par ces acteurs sont parfaitement inutiles aux fonctions originelles de ces services, et les vampirisent financièrement et humainement. Autrement dit, la restructuration des études d’infirmières, si elle vise à instaurer une pénurie de personnel soignant, a donné lieu en revanche à l’apparition d’une multitude de secteurs d’activité, engendrant une multitude de dépenses supplémentaires pour les futurs soignants, ainsi qu’une bureaucratie démentielle, qui n’existaient tout simplement pas auparavant, et dont l’enseignement proprement dit des soins infirmiers et de la profession n’avaient nul besoin. Ces secteurs, qui, eux, ont fondamentalement besoin de la profession infirmière, puisque c‘est elle qui justifie leur existence, se multiplient ainsi au détriment du niveau soignant, tel un virus au détriment de son hôte. Les flux d’argent qu’ils génèrent sont occultes, leurs montants, fantaisistes (voir cette page Facebook sur laquelle le prix des prépas varie d’un mois à l’autre www.facebook.com/aubagneifsiconcours/posts/1132951856743432) et leurs destinations, invérifiables. Ce dont il s’agit ici est d’un détournement de la fonction des services publics à des fins de profits privés. Cette restructuration de la santé a également donné lieu à l’apparition d’un système de contrôle des soignants, à travers une multiplication de nouveaux échelons administratifs, de techniques d’évaluation, de la bureaucratie qu’elles nécessitent, de modélisations variées basées sur des escroqueries intellectuelles et utilisées comme techniques de manipulation des agents, visant non plus à former des soignants compétents et efficaces, prodiguant des soins adaptés aux besoins et au bien-être des patients, mais à subordonner leur comportement au travail et le contenu de celui-ci à une politique du chiffre et une culture du résultat. Quant à la scientificité que s’auto-attribuent les responsables de cette gestion à travers des statistiques aux prédictions auto-réalisatrices pour accréditer leur légitimité et justifier les fausses cartes de la réalité générées par leurs pseudo-modèles, une démarche scientifique réelle est incompatible avec une conception idéologique des affaires humaines réduisant la gestion de celles-ci au seul paramètre financier, et incompatible avec des études biaisées élaborées non pas en fonction de l’examen des faits, mais des résultats à atteindre. En d’autres termes, ces gestionnaires ont produit des structures dépourvues de fonction réelle pour le groupe humain au détriment duquel elles prolifèrent, structures qui grugent les budgets, et dont la seule fonction consiste à perpétuer leur propre existence. Le modèle utilisé ici dans la santé l’est également dans les autres services publics, dupliqué à l’infini, à travers la gestion entrepreneuriale de ceux-ci : police, gendarmerie, armée, poste, enseignement, etc., avec des conséquences humaines et financières similaires. Ainsi, dans le domaine de la défense :
[1] IFSI : « Institut de Formation en Soins Infirmiers ». Cet acronyme est utilisé à partir de cette réforme des années quatre-vingt pour désigner les écoles d’infirmières. 2ième partie : 8. Comment sort-on de là ? En appliquant la constitution, en accordant nos actes à « nos valeurs » nationales réelles, et en prenant en compte les textes européens Site d'infos complémentaire : Infirmier en Belgique : http://www.infirmiers.com/inf/etranger/ide-belgique.php Le Monde (28/02/06) : Un rapport dénonce l'opacité de la formation médicale continue Février 2006 |
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